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LAST EXIT
3 novembre 2008

Le Manifeste du Groupe ouvrier du PC russe (bolchevik) (1)

Miasnikov_copier

Tout ouvrier conscient, que ne laisse indifférent ni les souffrances et tourments de sa classe ni la lutte titanique qu'elle mène, a certainement réfléchi plus d'une fois au destin de notre révolution à tous les stades de son développement. Chacun comprend que son sort est lié de façon très étroite à celui du mouvement du prolétariat mondial.
On lit encore dans le vieux programme social-démocrate que "le développement du commerce crée une liaison étroite entre les pays du monde civilisé" et que "le mouvement du prolétariat devait devenir international, et qu'il est déjà devenu tel".

Le travailleur russe, lui aussi, a appris à se considérer comme soldat de l'armée mondiale du prolétariat international et à voir dans ses organisations de classe les troupes de cette armée. Chaque fois donc qu'est soulevée la question inquiétante du destin des conquêtes de la Révolution d'octobre, il tourne son regard là-bas, au-delà des frontières où sont réunies les conditions pour une révolution; mais où, néanmoins, la révolution ne vient pas.

Mais le prolétaire ne doit pas se plaindre, ni baisser la tête parce que la révolution ne se présente pas à un moment déterminé. Il doit au contraire se poser la question : que faut-il faire pour que la révolution arrive?

Quand le travailleur russe tourne ses regards vers son propre pays, il voit la classe ouvrière qui a accompli la révolution socialiste, assumé les plus dures épreuves de la N.E.P. (Nouvelle Économie Politique) et, face à elle, les héros de la N.E.P., toujours plus gras. Comparant leur situation à la sienne, il se demande avec inquiétude : où allons-nous exactement?

Il lui vient alors les pensées les plus amères. Il a supporté, lui, le travailleur, la totalité du poids de la guerre impérialiste et de la guerre civile; il est fêté, dans les journaux russes, comme le héros qui a versé son sang dans cette lutte. Mais il mène une vie misérable, au pain et à l'eau. Au contraire ceux qui se rassasient du tourment et de la misère des autres, de ces travailleurs qui ont déposé leurs armes, ceux-là vivent dans le luxe et la magnificence. Où allons-nous donc ? Qu'adviendra-t-il après? Est-il vraiment possible que la N.E.P. de "Nouvelle économie politique" se transforme en Nouvelle Exploitation du Prolétariat? Que faut-il faire pour détourner de nous ce péril?

Quand ces questions se posent à l'improviste au travailleur, il regarde machinalement en arrière afin d'établir un lien entre le présent et le passé, comprendre comment on a pu arriver à une telle situation. Quelque amères et instructives que soient ces expériences, le travailleur ne peut s'y retrouver dans le réseau inextricable des événements historiques qui se sont déroulés sous ses yeux.

Nous voulons l'aider, dans la mesure de nos forces, à comprendre les faits et si possible lui montrer le chemin de la victoire. Nous ne prétendons pas au rôle de magiciens ou de prophètes dont la parole serait sacrée et infaillible; au contraire nous voulons qu'on soumette tout ce que nous avons dit à la critique la plus aiguë et aux corrections nécessaires.

Aux camarades communistes de tous les pays !

L'état actuel des forces productives dans les pays avancés et particulièrement dans ceux où le capitalisme est hautement développé donne au mouvement prolétarien de ces pays le caractère d'une lutte pour la révolution communiste, pour le pouvoir des mains calleuses, pour la dictature du prolétariat. Ou l'humanité, en d'incessantes guerres nationales et bourgeoises sombrera dans la barbarie en se noyant dans son propre sang; ou le prolétariat accomplira sa mission historique : conquérir le pouvoir et mettre fin une fois pour toutes à l'exploitation de l'homme par l'homme, à la guerre entre les classes, les peuples, les nations; planter le drapeau de la paix, du travail et de la fraternité.

La course aux armements, le renforcement précipité des flottes aériennes d'Angleterre, de France, d'Amérique, du Japon, etc., nous menacent d'une guerre inconnue jusqu'ici dans laquelle des millions d'hommes périront et les richesses des villes, des usines, des entreprises, tout ce que les ouvriers et les paysans ont créé par un travail épuisant, sera détruit.

Partout c'est la tâche du prolétariat de renverser sa propre bourgeoisie. Plus vite il le fera dans chaque pays, plus vite le prolétariat mondial réalisera sa mission historique.

Pour en finir avec l'exploitation, l'oppression et les guerres, le prolétariat ne doit pas lutter pour une augmentation de salaire ou une réduction de son temps de travail. Ce fut nécessaire autrefois, mais aujourd'hui il faut lutter pour le pouvoir.

La bourgeoisie et les oppresseurs de toute sorte et de toute nuance sont très satisfaits des socialistes de tous les pays, précisément parce qu'ils détournent le prolétariat de sa tâche essentielle, de la lutte contre la bourgeoisie et contre son régime d'exploitation : ils proposent continuellement de petites revendications mesquines sans manifester la moindre résistance à l'assujettissement et à la violence. De cette façon, ils deviennent, à un certain moment, les seuls sauveteurs de la bourgeoisie en face de la révolution prolétarienne. La grande masse ouvrière accueille en effet avec méfiance ce que ses oppresseurs directement lui proposent; mais si la même chose lui est présentée comme conforme à ses intérêts et enrobée de phrases socialistes, alors la classe ouvrière, troublée par ce discours, fait confiance aux traîtres et gaspille ses forces en un combat inutile. La bourgeoisie n'a donc pas et n'aura jamais, de meilleurs avocats que les socialistes.

L'avant-garde communiste doit avant tout chasser de la tête de ses camarades de classe toute crasse idéologique bourgeoise et conquérir la conscience des prolétaires pour les conduire à la lutte victorieuse.

On doit naturellement chercher de toutes les façons à conquérir la sympathie du prolétariat; mais pas au prix de concessions, d'oublis ou de renoncements aux solutions fondamentales. Celui-là doit être combattu qui, par souci de succès immédiat, abandonne ces solutions, ne guide pas, ne cherche pas à conduire les masses mais les imite, ne les conquiert pas mais se met à leur remorque.

On ne doit jamais attendre l'autre, rester immobile parce que la révolution n'éclate pas simultanément dans tous les pays. On ne doit pas excuser sa propre indécision en invoquant l'immaturité du mouvement prolétarien et encore moins tenir le langage suivant : "Nous sommes prêts pour la révolution et même assez forts; mais les autres ne le sont pas encore; et si nous renversons notre bourgeoisie sans que les autres en fassent autant, qu'arrivera-t-il alors?".

Supposons que le prolétariat allemand chasse la bourgeoisie de son pays et tous ceux qui la servent. Que se produira-t-il? La bourgeoisie et les social-traîtres fuiront loin de la colère prolétarienne, se tourneront vers la France et la Belgique, supplieront Poincaré et Cie de régler son compte au prolétariat allemand. Ils iront jusqu'à promettre aux Français de respecter le traité de Versailles, leur offrant peut-être en sus la Rhénanie et la Ruhr. C'est-à-dire qu'ils agiront comme le firent et le font encore la bourgeoisie russe et ses alliés sociaux-démocrates. Naturellement Poincaré se réjouira d'une si bonne affaire : sauver l'Allemagne de son prolétariat, comme y procédèrent, pour la Russie soviétique, les larrons du monde entier. Malheureusement pour Poincaré et Cie, à peine les ouvriers et paysans qui composent leur armée auront-ils compris qu'il s'agit d'aider la bourgeoisie allemande et ses alliés contre le prolétariat allemand, qu'ils retourneront leurs armes contre leurs propres maîtres, contre Poincaré lui-même. Celui-ci pour sauver sa propre peau et celle des bourgeois français, rappellera ses troupes, abandonnera à son sort la pauvre bourgeoisie allemande avec ses alliés socialistes, et cela même si le prolétariat allemand a déchiré le traité de Versailles. Poincaré chassé du Rhin et de la Ruhr, on proclamera une paix sans annexion ni indemnité sur le principe de l'autodétermination des peuples. Il ne sera pas difficile pour Poincaré de s'entendre avec Cuno et les fascistes; mais l'Allemagne des conseils leur brisera les reins. Quand on dispose de la force, il faut s'en servir et non tourner en rond.

Un autre danger menace la révolution allemande, c'est l'éparpillement de ses forces. Dans l'intérêt de la révolution prolétarienne mondiale, le prolétariat révolutionnaire tout entier doit unir ses efforts. Si la victoire du prolétariat est impensable sans rupture décisive et sans combat sans merci à l'égard des ennemis de la classe ouvrière, des social-traîtres de la Seconde Internationale qui répriment à main armée le mouvement révolutionnaire prolétarien dans leur pays ö soi-disant libre ö de même cette victoire est impensable sans la réunion de toutes les forces qui ont pour but la révolution communiste et la dictature du prolétariat. C'est pourquoi nous, le Groupe ouvrier du parti communiste russe (bolchevik) qui nous comptons, organisationnellement et idéologiquement, parmi les partis adhérant à la IIIe Internationale, nous nous tournons vers tous les prolétaires révolutionnaires communistes honnêtes en les appelant à unir leurs forces pour la dernière et décisive bataille. Nous nous adressons à tous les partis de la IIe Internationale comme à ceux de la IVe Internationale communiste ouvrière, ainsi qu'aux organisations particulières qui n'appartiennent à aucune de ces internationales mais poursuivent notre but commun pour les appeler à constituer un front uni pour le combat et la victoire.

La phase initiale s'est achevée. Le prolétariat russe, en se fondant sur les règles de l'art révolutionnaire prolétarien et communiste, a abattu la bourgeoisie et ses laquais de toute espèce et de toute nuance (socialistes-révolutionnaires, mencheviks, etc.) qui la défendaient avec tant de zèle. Et, bien que beaucoup plus faible que le prolétariat allemand, il a comme vous le voyez repoussé toutes les attaques que la bourgeoisie mondiale dirigeait contre lui à l'incitation des bourgeois, des propriétaires fonciers et des socialistes de Russie.

C'est maintenant au prolétariat occidental qu'il incombe d'agir, de réunir ses propres forces et de commencer la lutte pour le pouvoir. Ce serait évidemment dangereux de fermer les yeux devant les dangers qui menacent au sein même de la Russie soviétique la révolution d'octobre et la révolution mondiale. L'Union soviétique traverse actuellement ses moments les plus difficiles : elle affronte tant de déficiences, et d'une telle gravité, qu'elles pourraient devenir fatales au prolétariat russe et au prolétariat du monde entier. Ces déficiences dérivent de la faiblesse de la classe ouvrière russe et de celles du mouvement ouvrier mondial. Le prolétariat russe n'est pas encore en mesure de s'opposer aux tendances qui d'un côté conduisent à la dégénérescence bureaucratique de la N.E.P. et d'un autre mettent en grand péril, aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur, les conquêtes de la révolution prolétarienne russe.

Le prolétariat du monde entier est directement et immédiatement intéressé à ce que les conquêtes de la Révolution d'octobre soient défendues contre toute menace. L'existence d'un pays comme la Russie en tant que base de la révolution communiste mondiale signifie déjà une garantie de victoire, et en conséquence l'avant-garde de l'armée prolétarienne internationale ö les communistes de tous les pays ö doit exprimer fermement l'opinion encore muette du prolétariat sur les déficiences et sur les maux dont souffrent la Russie soviétique et son armée de prolétaires communistes, le PCR (bolchevik).

Le Groupe ouvrier du PCR (b) qui est le mieux informé sur la situation russe entend commencer l'oeuvre. Nous ne sommes pas de l'avis que nous prolétaires communistes, ne pourrions pas parler de nos défauts parce qu'il y a au monde des social-traîtres et des gredins qui, comme on le soutient, pourraient utiliser ce que nous disons contre la Russie soviétique et le communisme. Toutes ces craintes sont sans fondement. Que nos ennemis soient ouverts ou cachés est tout à fait indifférent : ils demeurent ces artisans de malheur qui ne peuvent vivre sans nous nuire, nous prolétaires et communistes qui voulons nous libérer du joug capitaliste. Que s'en suit-il? Devons-nous à cause de cela passer sous silence nos maladies et nos défauts, ne pas en discuter ni prendre des mesures pour les extirper? Qu'adviendra-t-il si nous nous laissons terroriser par les social-traîtres et si nous nous taisons? Dans ce cas les choses peuvent aller si loin qu'il ne restera plus, des conquêtes de la Révolution d'octobre, que le souvenir. Ce serait d'une grande utilité pour les social-traîtres et un coup mortel pour le mouvement communiste prolétarien international. C'est justement dans l'intérêt de la révolution prolétarienne mondiale et de la classe ouvrière que nous, Groupe ouvrier du PCR (bolchevik), nous commençons, sans trembler devant l'opinion des social-traîtres, à poser dans sa totalité la question décisive du mouvement prolétarien international et russe. Nous avons déjà observé que ses défauts peuvent s'expliquer par la faiblesse du mouvement international et russe. La meilleur aide que le prolétariat des autres pays puisse apporter au prolétariat russe c'est une révolution dans son propre pays, ou au moins dans un ou deux pays de capitalisme avancé. Même si à l'heure actuelle les forces n'étaient pas suffisantes pour réaliser un tel but, elles seraient dans tous les cas en mesure d'aider la classe ouvrière russe à conserver les positions conquises lors de la Révolution d'octobre, jusqu'à ce que les prolétaires des autres pays se soulèvent et vainquent l'ennemi.

La classe ouvrière russe, affaiblie par la guerre mondiale impérialiste, la guerre civile et la famine, n'est pas puissante, mais, devant les périls qui la menacent actuellement, elle peut se préparer à la lutte justement parce qu'elle a déjà connu ces dangers; elle fera tous les efforts possibles pour les surmonter et elle y réussira grâce à l'aide des prolétaires des autres pays.

Le Groupe ouvrier du PCR (bolchevik) a donné l'alarme et son appel trouve un large écho dans toute la grande Russie soviétique. Tout ce qui, dans le PCR, pense de façon prolétarienne et honnête se réunit et commence la lutte. Nous réussirons certainement à éveiller dans la tête de tous les prolétaires conscients la préoccupation du sort qui guette les conquêtes de la Révolution d'octobre? La lutte est difficile; on nous a contraints à une activité clandestine : nous opérons dans l'illégalité. Notre Manifeste ne peut être publié en Russie : nous l'avons écrit à la machine et diffusé illégalement. Les camarades qui sont soupçonnés d'adhérer à notre Groupe sont exclus du parti et des syndicats, arrêtés, déportés, liquidés.

A la douzième conférence du PCR (bolchevik), le camarade Zinoviev a annoncé, avec l'approbation du parti et des bureaucrates soviétiques, une nouvelle formule pour opprimer toute critique de la part de la classe ouvrière, en disant : "Toute critique à l'égard de la direction du PCR, qu'elle soit de droite ou de gauche, est du menchevisme" (cf. son discours à la douzième conférence). Qu'est-ce que cela signifie? Cela signifie que si les lignes fondamentales de la direction n'apparaissent pas justes à un quelconque ouvrier communiste et que, dans sa simplicité prolétarienne, il commence à les critiquer, on l'exclura du parti et du syndicat; remettra à la GPU (Tchéka). Le centre du PCR ne veut tolérer aucune critique car il se considère aussi infaillible que le pape romain. Nos soucis, les soucis des travailleurs russes au sujet du destin des conquêtes de la Révolution d'octobre, tout cela est déclaré contre-révolutionnaire. Nous, le Groupe ouvrier du PCR (bolchevik), nous déclarons, devant le prolétariat du monde entier, que l'Union soviétique est une des plus grandes conquêtes du mouvement prolétarien international. C'est justement à cause de cela que nous lançons le cri d'alarme, parce que le pouvoir des soviets, le pouvoir du prolétariat, la victoire d'octobre de la classe ouvrière russe, menacent de se transformer en une oligarchie capitaliste. Nous déclarons que nous empêcherons de toutes nos forces la tentative de renverser le pouvoir des soviets. Nous le ferons bien qu'au nom du pouvoir des soviets on nous arrête et on nous envoie en prison. Si le groupe dirigeant du PCR déclare que nos soucis au sujet de la révolution d'octobre sont illégaux et contre-révolutionnaires, vous pouvez, prolétaires révolutionnaires de tous les pays, et avant tout vous qui adhérez à la IIIe Internationale, exprimer votre opinion décisive sur la base de la connaissance de notre Manifeste. Camarades, les regards de tous les prolétaires de Russie qui sont inquiets à cause des dangers qui menacent le grand Octobre sont dirigés sur vous. Nous voulons qu'à vos réunions vous discutiez de notre Manifeste et que vous insistiez pour que les délégués de vos pays au Ve Congrès de la IIIe Internationale soulèvent la question des fractions à l'intérieur des partis et de la politique du PCR vis-à-vis des soviets. Camarades, discutez de notre Manifeste et faites des résolutions. Sachez, camarades, que de cette manière vous aiderez la classe ouvrière de Russie, épuisée et martyrisée, à sauver les conquêtes de la Révolution d'octobre. Notre Révolution d'octobre est une partie de la Révolution mondiale!

Au travail camarades ! Vivent les conquêtes de la Révolution d'octobre du prolétariat russe ! Vive la révolution mondiale !

Gavril Ilitch Miasnikov

Moscou, février 1923.
Le Bureau central provisoire d'organisation du Groupe ouvrier du PCR (b).

source : http://www.left-dis.nl/f/miasgo.htm

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