Apprendre à nuire

Chaque année de grandes écoles recrachent des graines de despotes avalées juste après le bac, en ayant au préalable trié les "meilleurs morceaux" par concours. Sous les applaudissements nourris de parents extasiés face aux performances de leurs rejetons, nos émules, cuirassées d’ambition, n'auront plus qu'une idée en tête, celle de s’appliquer à nuire. Les parents ne savent pas forcément que leurs petits moi-miniature vont mariner pendant quelque temps dans un jus délétère, histoire qu’ils s’imprègnent bien des rudiments indispensables au bon apprentissage de l’organisation du pouvoir, appelée aussi politique. Ils vont tout ingurgiter les boutonneux, avec voracité, afin de le redistribuer généreusement à leurs congénères par la suite, sans oublier les poignées de mains et autres sourires en coin de fin de promo. Manoeuvres, croc-en-jambe et coups en pute seront des exercices quotidiens qui deviendront bien vite de simples modalités pour nos petites graines de politiciens, encore embryons dans cet univers parasitaire et au sein duquel ils triompheront sous peu. Parvenus au terme de cette initiation maléfique, nos graines de mégalo auront germé en parfaits bourgeois qui ne cesseront de vouloir mettre en pratique le plus tôt possible ce qu’ils auront appris si consciencieusement durant toute leur période d’instruction. Pot-de-Vin, faux et usage de faux, détournement d’argent public, abus de pouvoir, extorsion de fonds, comptes frauduleux, chantage en tous genre, profits indus et privilèges multiples seront l’apanage de nos anciens élèves excellant au sein de leurs nouvelles fonctions, au pluriel s'il vous plait car nos hommes et femmes politiques sont goulus et apprécient les cumuls éminemment lucratifs.
Certains individus se passeront du passage par Sciences-Po ou l'ENA et feront leur apprentissage sur le terrain, en faisant preuve d’au moins autant de talent que leurs collègues dans l’exercice de leur rôle malfaisant, se permettant même quelque zèle en matière de supercherie.
Aussi, dans l’échafaudage du pire, à partir du moment où on a le pied à l’étrier et que l’on garde bien en tête le maître-mot “NUIRE”, tout le monde à sa chance. Quelques-uns atteindront des sommets dans ce que l’homme est capable de faire à l’homme. Alors qu’ils auront suivi à la lettre et pendant des années un processus de déshumanisation inéluctable pour parvenir à ce qu’ils sont, ils se targueront tout de même de réussir à moraliser ce qui entretient si formidablement bien leur train de vie aux dépens de la multitude. Pas de gadin en vue concernant le capitalisme tant que la politique est ce qu'elle est en France et dans le monde.

L'échantillonnage ci-dessus est loin d'être exhaustif.